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Résumé

Phase I. Hydromagmatisme sutseyen, formations de maars, les dépôts se font dans une lagune et sont palagonitisés (tufs jaunes). 
Phase II. Vers 1 Ma, passage d’un dynamisme phréato-magmatique à un dynamisme strombolien dans la partie nord de la zone étudiée, avec remplissage des maars par un lac de basalte. Puis édification de cônes stromboliens avec coulées de laves.
Phase III Comblement de la lagune, phréato-magmatisme, les dépôts ne sont plus palagonitisés (tufs gris) ; dépôts dans zone émergée.
Phase IV. 750 000 ans, mise en place de filons de basalte, synchrone de la phase III.

Phase V. Érosion côtière, formation de la plage de la Conque révélant des dépôts de tufs jaune et gris, des dépôts stromboliens et découverte des filons de basalte. Exploitation industrielle des dépôts scoriacés.

Conclusion

Le complexe volcanique du mont Saint-Loup, ne doit plus être considéré comme un édifice unique dont l’érosion ultérieure aurait délimité trois reliefs volcaniques (mont Saint-Loup, Petit Pioc’h et mont Saint-Martin). Il est interprété comme trois cônes volcaniques plus ou moins complexes (le Mont Saint-Loup a pu avoir plusieurs centres d’émissions).
Dans le modèle d’évolution d’un dynamisme hydromagmatique vers un dynamisme strombolien, les cheminées d’alimentation des cônes se mettent en place le long de failles bordières de l’ancien maar. Les 3 cônes stromboliens sont interprétés comme la phase terminale du maar du mont Saint-Loup après la mise en place d’un lac de lave (remplissage du maar), en partie solidifié.

Les failles observées au mont Saint-Loup et au Petit Pioc’h, de pendage NE à N-NE, confirmeraient un début de déstabilisation de l’ensemble des édifices volcaniques. Elles pourraient confirmer le fonctionnement selon un modèle «Nugère», chaîne des Puys (surcharge d’édifices stromboliens sur un lac de lave en partie solidifié), avec émission par débordement de la coulée de Baldy-Batipaume vers le NE.

La plage de la Conque, site exceptionnel par la qualité de ses affleurements, n’a été préservée de l’érosion marine que par le «blindage» basaltique du dyke qui forme le rocher des Deux-Frères au sud et au nord de la plage, sous la forme d’un sill. Les vues aériennes de cette zone semblent montrer l’absence de continuité, au moins en surface, des deux extrémités de ce filon. L’érosion de la plage de la Conque confirme cette hypothèse, la partie centrale non protégée étant érodée.

La plage de la Capitainerie dont l’ensemble des dépôts de tufs forme un arc de cercle concave parfait de 250 m de longueur pose un problème nouveau.

Deux hypothèses peuvent être avancées :

- cela pourrait être l’indice d’un autre dyke de basalte s’injectant près de la plage de la Capitainerie. Deux causes identiques ayant les mêmes effets, on retrouverait le même soulèvement que sur la plage de la Conque ;
- un édifice volcanique aujourd’hui disparu, dont les traces seraient le pendage de ces dépôts phréatomagmatiques et les quelques restes de coulées de basalte avec une pente nette vers la mer. L’urbanisation de cette zone permet difficilement d’accéder aux informations utiles pour confirmer ou non cette hypothèse.

Les observations effectuées sur les différents affleurements d’intrusions basaltiques, montrent une injection oblique du NO vers le SE. Selon le pendage des tufs gris redressés par cette intrusion, l’angle serait de l’ordre de 45°.
Cette injection basaltique, synchrone de l’épisode des tufs gris au niveau de la plage de la Conque (zone perturbée, dépôts liés aux reliefs, conduits d’évacuation des fluides), pourrait avoir eu un épisode aérien dont on ne retrouverait que des lambeaux de lave dans les tufs gris.
La mise en place de cet épisode filonien pourrait être en relation avec un second épisode strombolien du Mont Saint-Loup, ou d’un autre édifice au même stade éruptif.

Datation

Les datations les plus récentes indiquent un épisode II à 1 Ma et la phase IV à 0,75 Ma, suggérant une activité sur une période d’environ 250 000 ans !

Une étude plus approfondie sur les relations inter-édifices pourrait donner des informations sur leur mise en place, l’étude des coulées de lave de cette zone pourrait indiquer la direction des zones d’émissions.
D’autres édifices stromboliens ont pu exister pendant de courtes périodes. Quelques traces de dépôts scoriacés sont observables en direction de la plage du Môle, en intercalation avec les tufs. Ces dépôts sont soit synchrones de l’épisode strombolien du mont Saint-Loup, soit liés à de petites périodes stromboliennes de l’un des maars temporairement isolé de l’eau.

La coupe de synthèse (schéma 6) n’est pas totalement représentative du fonctionnement complexe de ces quelques kilomètres carrés au cours du dernier million d’années. En effet, les éléments relevés sur le terrain indiquent que plusieurs appareils volcaniques ont fonctionné en même temps avec des dynamismes différents, avec des phases hydromagmatiques, phréatomatiques, stromboliennes et des dépôts aussi bien en milieu anhydre qu’aqueux.
Les différents affleurements montrent des alternances de ces différents dépôts.
Cette activité mixte, maar et volcan strombolien comme au Puy de l’Enfer et à la Narse d’Espinasse (Auvergne) a été observée en activité au maar d’Ukinrek en Alaska en 1977.
Un étudiant en maîtrise de l’IGAL (Yvain D’Arco) a soutenu en 2003 un mémoire sur «Les tufs jaunes, interprétation paléo-environnementale du Cap d’Agde». Cette soutenance à laquelle j’ai participé en tant que membre du jury, a apporté de très nombreux nouveaux éléments, en partie repris dans cet article.

Il serait souhaitable que d’autres mémoires et thèses soient proposés sur cette région, encore trop méconnue.

Photo 28 - Plage de la Conque (zone NE), sill de basalte redressant les tufs jaunes ayant coulissés en redressant les tufs gris (Alain Guillon).
Photo 28 - Plage de la Conque (zone NE), sill de basalte redressant les tufs jaunes ayant coulissés en redressant les tufs gris
(Alain Guillon).