La région du Sud-Limousin, ou Bas-Limousin, est souvent  citée comme cas d’école pour illustrer le métamorphisme régional, et plus  précisément le métamorphisme de gradient standard, dit « dalradien » :  voir Figure 1. Ce septième entretien a pour objet de présenter les  éléments de base et les indications concrètes pour la préparation d’une visite  sur le terrain. Cette visite peut être conçue comme une initiation à la  pétrographie, et à la tectonique, appliquées au métamorphisme. Dans beaucoup de  cas, elle tire parti des beaux affleurements qui apparaissent sur une quinzaine  de kilomètres le long de la N89, en suivant le cours de la Corrèze de Brive à  Tulle. 
        
          Figure 1 : le  gradient dalradien est aussi dénommé gradient « barrowien », ou  encore gradient de moyenne pression, à disthène-sillimanite. Le  graphique, établi d’après Miyashiro, est tiré de l’ouvrage « minéraux et  roches métamorphiques », de J.Cl.Pons (CRDP de l’académie de Grenoble,  2001).
      En balayant du regard la carte géologique du BRGM  d’Ouest en Est ( feuille de Tulle), à partir de l’extrémité du bassin de grès  du Permien de Brive, il apparaît une succession de zones à métamorphisme  croissant, depuis les schistes et quartzites de métamorphisme faible, jusque  aux gneiss à Disthène et Sillimanite. D’autre part, nous avons  déjà décrit l’apparition des migmatites (sixième entretien) au cœur  de l’anticlinal. Le « gradient » se matérialise sur la  Figure 2 par les isogrades des  minéraux index classiques.
        
  Figure 2 : carte  géologique simplifiée du Sud-Limousin, tirée de la notice de la carte BRGM au 1/50 000,  feuille Tulle, faisant apparaître les isogrades du métamorphisme régional.
       Les conditions sembleraient donc réunies pour appliquer le schéma du  gradient dalradien.  
  Cependant, l’examen plus détaillé  de la carte de la figure 3 ci-dessous et les observations sur le terrain  montrent une situation bien plus complexe. Nous allons le constater en suivant  un axe SO-NE, défini par la vallée de la Corrèze depuis Malemort, à la sortie Est de Brive,  jusque et au-delà de Tulle. Les terrains métamorphiques apparaissent sous la  forme de bandes parallèles, allongées suivant l’axe NO-SE, et ceci jusqu’à  l’axe médian de l’anticlinal de Tulle, puis à peu près symétriquement au-delà.  Ces bandes ont été codées par les auteurs de la carte à l’aide des lettres  grecques suivantes :
      ρχ,  ζ et λ,  pour les terrains métamorphiques… 
      
      Ce sera l’objet du §3 de cet entretien de comprendre la raison de ces  distinctions.
         Quatre éléments vont jouer un rôle déterminant dans les observations. Ce  sont:    
      
        
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          les discontinuités,  | 
         
        
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          les corps basiques et leur énigme ! | 
         
        
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          la migmatisation,  | 
         
        
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          les  intrusions, | 
         
       
    Que nous allons maintenant détailler.
    -  De  nombreuses discontinuités affectent l’observation des paragenèses et des  minéraux index, du fait que entre plusieurs  zones métamorphiques (les bandes parallèles citées plus haut), les roches  d’origine peuvent varier et même différer complètement ; en d’autres  termes, on observe une succession de roches métamorphiques paradérivées et orthodérivées (les termes sont expliqués §3.2). On va donc être amené  à approfondir la notion de  roche d’origine, à partir  de la texture de la roche métamorphique, qui peut avoir retenu des témoins des  origines, et aussi à partir de son chimisme. 
    -  De  nombreux petits corps de formations métamorphiques basiques sont présents. Les  plus importants, du point de vue de la signification géodynamique, sont les éclogites dy à l’Est de Tulle(voir  le cinquième entretien), et les amphibolites au centre et à l’Est de  l’anticlinal. Il s’agit là d’une véritable énigme : comment des  assemblages appartenant au faciès des éclogites, peuvent-ils se retrouver au  sein de métapélites du faciès amphibolites ? la réponse sera apportée au  §5, par le modèle géodynamique de la grande collision à l’origine de la  formation de la chaîne hercynienne.
    -  Une vaste zone de migmatisation recoupe les zones  du gradient métamorphique 
    -  Enfin,  l’ensemble de l’anticlinal de Tulle est recoupé par des massifs intrusifs de 
  granitoïdes, dont l’un, g4 au centre  de l’anticlinal, est manifestement lié à la migmatisation déjà citée. Ces  massifs sont organisés en bandes parallèles intercalées dans les zones  métamorphiques, et disposées symétriquement par rapport à l’axe de  l’anticlinal : voir figure 3.  
      
    figure 3 : carte géologique simplifiée en  couleur du Sud-Limousin, d’après la notice de la carte BRGM au 1/50 000,  feuille Tulle. L’utilisation de la couleur permet de mieux visualiser la  succession d’Ouest en Est des terrains métamorphiques et des intrusions  décrites au paragraphe 3.2.
    Ayant en mémoire ces quatre éléments, et en  procédant à l’analyse pétrographique détaillée sur le terrain (§3), il sera  possible d’extraire de cette apparente complexité l’histoire métamorphique et  magmatique de la   région. Toutefois, cela nécessitera de recourir aux résultats  des techniques radioactives de datation (§ 4), qui éclaireront la succession  des évènements dans un cadre interprétatif géodynamique (§5).  |